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Pèlerin d’Orient - À pied jusqu’à Jérusalem

À pied jusqu’à
Jérusalem


Éditions Transboréal

2° édition : janvier 2009
Prix : 22,50 €

Récit

368 pages
99 photographies


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« Je glisse la clé de l’appartement dans la boîte aux lettres. Furtivement. Comme une lettre d’amour dans laquelle on a jeté toute son âme.

Dehors, rien n’a changé. Les Parisiens vont et viennent, pressés, comme tous les matins. Chacun dans son monde, aux dimensions que je trouve aujourd’hui bien étriquées. Il y a quelques semaines, j’étais encore l’un d’entre eux. Chaque jour plus écrasé par la pression des habitudes, des futilités ronronnantes et des manquements aux rêves inaccessibles.

Un jour, ça suffit, ce n’est plus tenable. Aujourd’hui, je pars.

Seul. À pied. Vers Jérusalem. »




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Pèlerin d’Occident - À pied jusqu’à Rome

À pied jusqu’à
Rome


Éditions Transboréal

Parution : janvier 2009
Prix : 22,50 €

Récit

368 pages
122 photographies









[paiement en ligne sur site sécurisé]

« Cette histoire, j’aimerais la raconter un soir à un petit bout de chou avant qu’il ne s’endorme. À cette fillette blonde, par exemple, une nièce qui a des yeux d’un bleu si clair, cerclé d’outre-mer, que j’ai donné son regard troublant à Roxane, princesse de Sogdiane, dans le roman historique sur Alexandre le Grand dont je viens d’achever l’écriture. Mon histoire, c’est seulement essayer d’offrir parfois à la vie une allure de conte de fées. Alors voilà : « Il était une fois… » […]

En somme, ce que j’aime dans le voyage, c’est la promesse. Arriver, à la rigueur, il le faut bien quand on est parti. « Être arrivé », c’est probablement le pire. Et si je préfère le voyage, c’est sans doute parce que, sur terre, les promesses sont rarement tenues. J’aurais pu citer cela comme une des raisons de partir vers Rome. J’en ai mentionné beaucoup d’autres, depuis Pavarotti jusqu’à saint Pierre, en passant par Goethe et Virgile. Mais au fond, je sais qu’une seule les résumerait toutes, et si l’on ne m’accordait qu’un mot, je lâcherais : « Peggy ».

Les récits
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Jean-Baptiste Dupaty

Jean-Baptiste Dupaty

Né en 1746 et magistrat au parlement de Bordeaux, Jean-Baptiste Dupaty se fit aussi un nom comme homme de lettres. Ses Lettres sur l’Italie qui connurent un certain succès en France furent mises à l’Index par Rome. Se démarquant de la prose conventionnelle et terne de nombreux récits de voyage, Dupaty décrit ce qui l’entoure avec une grande vivacité, du relief et un sens pictural que ne renieraient pas les peintres dont il illustre les œuvres. Comme Lorsqu’il décrit l’incendie de Rome.

Une arrivée décevante

Parvenu, après trois heures de marche, de monts en monts, de rochers en rochers, au sommet escarpé de Radico-Fani, je trouvai le chaos, le désert, le silence. Il était nuit, mais le lendemain, en descendant à Ronciglione, je trouvai l’aurore, le chant du rossignol, la première branche d’aubépine, des vallons couverts de verdure, le célèbre lac de Trasimène et Viterbe tout en fleurs. Tout à coup, par un contraste nouveau, comme si on traversait les lieux habités par Armide, sous le plus beau ciel, rien ne se meut, rien ne vit, rien ne végète ; et dans le lointain on voit Rome. Le moment d’après, on ne voit plus rien. Dans ces chemins où jadis, de tous les coins de l’univers, les rois et les nations accouraient, où roulaient les chars de triomphe, qu’inondaient les armées romaines, où le voyageur rencontrait César, Cicéron, Auguste, je ne rencontrai que des pèlerins et des mendiants. Enfin, à force de percer le désert, la solitude et le silence, je me trouve au milieu de quelques maisons : je ne pus m’empêcher de verser des larmes ; j’étais dans Rome. Quoi ! C’est là Rome ! Quoi ! Rome, qu’on pressentait autrefois des extrémités de l’Asie, c’est aujourd’hui le désert, c’est le tombeau de Héron qui l’annonce ! Non, cette ville, ce n’est point Rome ; c’est son cadavre : cette campagne où elle gît est son tombeau ; et cette populace qui fourmille au milieu d’elle, des vers qui la dévorent.  Haut de page

Le choc des trois Romes

Ruines du Forum vers le Capitole, par Canaletto - Angleterre, collections royales
Ruines du Forum vers le Capitole
peint par Canaletto

Je suis arrivé hier au soir fort tard. Je n’ai pu fermer l’œil de la nuit. Toute la nuit cette idée allait dans mon âme : tu es à Rome. Les siècles, les empereurs, les nations, tout ce que ce vaste mot de Rome contient de grand, d’imposant, d’intéressant, d’effrayant. en sortait successivement ou à la fois, et environnait mon âme. Il me tardait que les premiers rayons du jour montrassent à mes yeux cette ancienne capitale de l’univers. Enfin je vois Rome. Je vois ce théâtre où la nature humaine a été tout ce qu’elle pourra être, a fait tout ce qu’elle pourra faire, a déployé toutes les vertus, a étalé tous les vices, a enfanté les héros les plus sublimes et les monstres les plus exécrables, s’est élevée jusqu’à Brutus, a descendu jusqu’à Néron, est remontée jusqu’à Marc Aurèle. Cet air que je respire à présent, c’est cet air que Cicéron a frappé de tant de mots éloquents ; les Césars de tant de mots puissants et terribles ;les papes, de tant de mots enchantés. Sur cette terre a donc coulé tant de sang ! Dans ces murs ont donc coulé tant de larmes ! Horace et Virgile ont récité ici leurs beaux vers ! Allons Mais où aller ?

Je suis au milieu de Rome comme au milieu de l’Océan : trois Romes, comme trois parties du monde, se présentent en même temps à mes regards ; la Rome d’Auguste, la Rome de Léon X et la Rome du pape actuel. Laquelle visiterai-je d’abord ? Elles m’appellent toutes a la fois. Où est le Capitole ? Où est le Musée de Clément XIV ? Qu’on me mène à l’arc de Titus. Que l’on m’arrête au Panthéon. Montrez-moi Sainte-Marie-Majeure. Je veux voir le tableau de la Transfiguration de Raphaël. Je ne vois pas l’Apollon du Belvédère ? Comment choisir à Rome ? Peut-on y arrêter ses regards ? Il faut que je commence par errer de côté et d’autre, pour user cette première impatience de voir qui m’empêcherait toujours de regarder. Je suis donc à Rome ! Je suis donc dans cette ville que tout l’univers regarde. Il n’y a point ici une pierre qui ne recèle une connaissance précieuse, qui ne puisse servir à bâtir l’histoire de Rome et des arts : sachez les interroger, car elles parlent.  Haut de page

L’incendie de Rome

L’incendie du Borgo, peint par Raphaël en 1517 - Musées du Vatican
L’incendie du Borgo
peint par Raphaël en 1517

Le feu prit hier, pendant la nuit, dans la place de Saint-Pierre, à côté du Vatican. Il prit à l’heure où les vieillards et les enfants dorment déjà, mais où les malheureux et les mères veillent encore. Jamais incendie n’a été plus furieux : il a menacé de consumer Rome. Irrité par un vent impétueux, il s’enflamma tout à coup. La nuit la plus sombre semblait éclairer de ses ténèbres cet incendie. Quels tableaux ont brillé affreusement à sa clarté. Je vois tout, j’entends tout. Les cris des mères déchirent encore mes entrailles.

J’avais passé la soirée dans les environs du Vatican [et] je m’en revenais chez moi, à la place d’Espagne. En entrant dans celle de Saint-Pierre, j’aperçois des flammes qui, s’élançant des toits du pauvre, qu’elles avaient déjà dévorés, montaient le long de vingt colonnes de marbre au sommet du Vatican. J’étais seul. Je l’avoue ; me croyant à un magnifique spectacle, je jouissais. Mais dans le moment il passa, à vingt pas de moi, un jeune homme qui portait un vieillard sur ses épaules. À la manière dont ce jeune homme regardait autour de lui, sondait sous ses pas la route, prenait garde de secouer le vieillard en marchant, je vis bien qu’il portait son père.

L’incendie du Borgo, peint par Raphaël en 1517 - Musées du Vatican

Ce vieillard, arraché inopinément au sommeil et à la flamme, ne sachant où il est, d’où il vient, où il va, ce qui se passait s’abandonnait : cependant un jeune enfant les précède, qui, tout troublé, de temps en temps les regarde ; une femme, vieille, presque nue, l’air indifférent, emportant les vêtements du vieillard, marchait derrière. Je les suivais d’un œil attendri lorsque je vis, à peu de distance, un autre jeune homme qui, tout nu, pressé de la flamme qui le suivait, les mains attachées en dehors à une fenêtre embrasée, et pendant de tout son corps le long de la muraille, choisissait de l’œil, sur le pavé, l’endroit le moins périlleux pour y tomber. Le vrai jour pour voir tout le cœur d’une mère, c’est bien la clarté d’un incendie ! Comme du haut d’une terrasse cette femme tendait à son mari qui était en bas le cher gage de leur union ! Elle s’avançait, elle se penchait, elle se penchait encore : l’enfant tenait toujours dans ses bras ou à son sein ou à ses lèvres ; mais enfin, entre les bras étendus de cette mère et les bras étendus de ce père, l’enfant endormi dans son berceau… J’ai détourné les yeux, et j’ai fui.

J’avais déjà traversé la place. Je rencontre, se sauvant d’un palais embrasé, toute parée encore et en larmes, vêtue d’habits magnifiques, et tenant par la main devant elle deux enfants nus, une femme grande, d’une beauté et d’une taille majestueuses. Le plus petit de ces enfants, en regardant crier et pleurer sa mère criait et pleurait aussi. La sœur, d’une figure charmante, transie de froid, tâchait de vêtir et même de voiler son jeune et tendre corps de ses bras et de ses mains pudiques. Malheureuse mère ! Il lui manquait sûrement un enfant ; elle en tenait deux par la main et elle pleurait. Cependant vieillards, enfants, soldats, prêtres, riches, pauvres, la foule incessamment s’amoncelle ; elle roulait d’un bout de la place à l’autre comme une mer agitée par la tempête. On entre dans l’église de Saint-Pierre, on en sort, on y rentre, on se précipite, on tombe. J’ai vu passer à côté de moi, emportée par quatre soldats, sur des sabres croisés, une jeune fille évanouie. Elle était belle ! La clarté de l’incendie flottait sur son front pâle ; elle brillait dans des larmes échappées de sa paupière et arrêtées sur ses joues. Mais dans toute cette scène effroyable, ce qui me causait le plus d’horreur, c’était, dans les intervalles où le vent se taisait, le silence. Alors il en sortait de toutes parts des soupirs étouffés, des gémissements profonds, le bruissement de la flamme qui dévore, le fracas des édifices qui, de moment en moment, croulent ; les cris des mères. Je sortis enfin de la place.

L’incendie du Borgo, peint par Raphaël en 1517 - Musées du Vatican

Soudain, à une fenêtre du Vatican, à côté même de la flamme, voilà une croix, voilà des prêtres, voilà, en habits pontificaux, le souverain pontife ! La foule à l’instant pousse un cri, à l’instant est à genoux ; à l’instant le pontife est environné dans les airs de cent mille regards en larmes, et de vingt mille bras en prières. Le pontife lève les yeux au ciel et il prie : le peuple baisse les yeux à terre, et il prie… Figurez-vous, murmurant comme de concert dans ce profond et religieux silence, l’ouragan, l’incendie et la prière ! Comment rendre le tableau qui s’est offert en ce moment à mes regards ? Sur une des marches de l’église, seule, isolée, une mère pressait de ses mains les petites mains de son enfant à genoux à côté d’elle, les joignait avec complaisance, et les mettait en prière. Derrière eux une jeune fille, les cheveux épars, éplorée, debout, tendait vers le pontife, de toute sa douleur et sans doute de tout son amour, les mains les plus pathétiques ; tandis qu’aux pieds de cette jeune fille, au contraire, assise le dos tourné au Vatican et au pontife, ne pleurant point, ne priant point, une femme, d’un air étonné, la regardait… Son enfant, en effet, jouait dans son sein.

Cependant le pontife a prié : il se lève. Le peuple, dans une attente inexprimable, le regardait. Alors d’une voix pleine d’espérance et le front calme, le pontife répand sur la foule prosternée les paroles religieuses qui la bénissent. Soudain, soit miracle, soit comme par miracle, les derniers mots de la bénédiction étaient encore dans les airs ; les vents n’étaient plus dans les airs ; la flamme retombe sur la flamme ; la fumée en noir tourbillon s’élève, enveloppe l’incendie, l’étouffe, et rend à la nuit toutes ses ténèbres.

Ah ! que ce tableau de Raphaël que l’on voit au Vatican, est admirable !  Haut de page

( Jean-Baptiste Mercier Dupaty, Lettres sur l’Italie en 1785, Éd. Froment, 1827)

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