Saint Willibald - un pèlerin anglais
Saint Willibald (ou Guillebaut dans une terminologie francisée) naît en Angleterre vers l’an 700 dans une riche et noble famille saxonne du comté de Southampton. Aux alentours de l’année 720, il se rend à Rome et poursuit son pèlerinage jusqu’en Terre sainte avant de revenir en Italie via Constantinople. Son récit, recueilli bien des années plus tard par une religieuse, est le premier livre de voyage écrit par un Anglais. Cousin de saint Boniface, il le rejoint en Allemagne après plusieurs années au monastère du Mont Cassin. Il passe la fin de sa vie comme prêtre, missionnaire et évêque en Thuringe où il meurt en 786.
Willibald est tout d’abord un pèlerin et il ne faut pas s’attendre à trouver dans son récit les notes d’un observateur scientifique. Quoiqu’il soit peu disert sur un grand nombre de choses que nous aimerions connaître, tel par exemple que le caractère des gens, les conditions de vie dans le pays ou l’état des villes par lesquelles il est passé, Willibald livre de précieux renseignements sur les Lieux saints. C’est le seul récit connu à ce jour d’un pèlerinage vers la Terre sainte au huitième siècle, formant ainsi un pont entre les travaux d’Arculfe (670) et de Bernard le Sage (870).
Un ardent désir
[Willibald] voulait tenter les chemins inconnus du pèlerinage, souhaitait aller contempler les terres des frontières lointaines et avait décidé d’affronter les étendues prodigieuses des mers. Tout de suite, il révéla à son père selon la chair ce désir secret de son cœur, tenu caché à tous. Il l’assiégeait de demandes pressantes, afin qu’il le conseillât sur ce désir d’accomplir son vœu de pèlerinage, qu’il lui donnât son consentement et la permission de partir. Il lui demandait même de l’accompagner dans son voyage. En l’invitant à accomplir un tel labeur et à changer totalement de vie, il voulait le voir se séparer des plaisirs du siècle, des délices du monde, de la fausse prospérité des richesses de la vie d’ici-bas. Il lui demandait, avec le secours du Seigneur, de s’engager dans la voie d’une vie bien construite, de commencer à se mettre au service de Dieu et, pour cela, d’abandonner sa propre patrie et de parcourir les vastes territoires de pèlerinage qui s’ouvraient devant lui. Ainsi, s’appliquant à lui parler avec douceur, il l’invitait à se joindre à ses fils et à gagner le bienheureux siège de Pierre. Mais le père, tout d’abord, refusa le départ demandé par son fils, invoquant la fragilité et la faiblesse de son épouse, de ses enfants encore jeunes et jugeant malhonnête et cruel de les priver de sa présence et de les abandonner à des étrangers.
Alors, le soldat du Christ reprit avec vaillance ses paroles d’exhortation et ses prières insistantes. Tantôt il le menaçait en lui faisant craindre une vie plus dure, tantôt il l’encourageait par la promesse de la paisible vise éternelle et de la douceur du Paradis dans l’amour du Christ. Bref, il essaya par tous les moyens et arguments d’obtenir son consentement et de susciter son courage. Enfin, avec l’aide du Dieu tout-puissant, la volonté de Willibald l’emporta. Lui-même, son père et son frère Wunebald firent le vœu d’entreprendre le chemin qu’il désirait et qu’il les exhortait à prendre.
Bain dans le Jourdain
Après quelques temps de repos, ils reprirent leur route vers le monastère de Saint-Jean-Baptiste où il y avait environ 20 moines. Il y passèrent la nuit et, de là, ils firent encore un mille pour atteindre le Jourdain au lieu du baptême du Seigneur. On y voit maintenant une église avec des colonnes de pierre et, au-dessous, la terre nue. C’est le lieu précis du baptême du Seigneur. À l’endroit où l’on baptise maintenant, une croix de bois est dressée au milieu de d’une petite dérivation du courant et une corde est tendue solidement d’un bord à l’autre du Jourdain. Le jour de l’Épiphanie, les malades et les infirmes se tiennent à cette corde pour se plonger dans l’eau. Les femmes stériles qui viennent ici sont aussi favorisées de la grâce du Seigneur. Notre évêque Willibald s’est baigné là, dans le Jourdain. Ils sont restés en ce lieu un jour.
Jérusalem et le tombeau
[Willibald] arriva à Jérusalem, au lieu où la sainte Croix du Seigneur fut trouvée. Il y a maintenant une église à l’endroit appelé le Calvaire. Il était jadis à l’extérieur de la ville, mais quand Hélène découvrit la Croix, elle fit inclure ce lieu dans Jérusalem. Trois croix de bois sont maintenant dressées à l’extérieur, contre le mur oriental de l’église, en mémoire de la sainte Croix du Seigneur et de ceux qui ont été crucifiés avec lui. Elles ne sont pas dans l’église, mais au-dehors, abritées sous un toit. À côté se trouve le jardin où se trouvait le tombeau du Seigneur. Ce tombeau avait été taillé dans le roc. Le roc s’élève au-dessus du sol, il est carré à la base et se termine en pointe. Au sommet, il y a une croix. Maintenant là s’élève là un merveilleux édifice. Du côté de l’orient, on a creusé une porte dans la pierre du tombeau par laquelle on entre pour prier. À l’intérieur se trouve le lit de roche sur lequel gisait le corps du Seigneur. Quinze lampes à huile d’or y brûlent nuit et jour. Le lit sur lequel reposait le corps du Seigneur est du côté nord, à l’intérieur du roc du tombeau, à main droite quand on entre dans le tombeau pour prier. Et, devant la porte du tombeau, est déposée une grande pierre carrée, semblable à celle que l’Ange roula à l’entrée du tombeau.
Ermitages du désert de Judée et monastère de Saint-Sabas
[À une faible distance de Bethléem], ils parvinrent dans la vallée de la Laure. On y trouve un grand monastère où résident l’abbé et le portier de l’église, ainsi que beaucoup d’autres moines qui habitent le monastère ou vivent le long de la vallée sur les pentes de la montagne. Ils ont creusé çà et là dans le roc de petits ermitages. Cette montagne forme un cercle autour de la vallée. Dans la vallée se trouve un monastère où repose saint Sabas.
Attaqué par un lion
Ils arrivèrent dans une grande plaine, couverte d’oliviers. Avec eux cheminait un Éthiopien avec deux chameaux et une mule, il conduisait une femme à travers la forêt. Sur la route, surgit un lion, rugissant la gueule ouverte, très menaçant, il voulait se saisir d’eux et les dévorer. Mais l’Éthiopien leur dit : « N’ayez pas peur, continuons à marcher. » Ils continuèrent et s’approchèrent de lui. Mais le lion, par le secours du Dieu très bon et tout-puissant, partit dans une autre direction, leur laissant la voie libre. Ils dirent avoir entendu ensuite ce lion craintif pousser de grands rugissements et dévorer des hommes occupés à la cueillette des olives.
Huneberc de Heidenheim - Hodœporicon Sancti Willibaldi
On peut consulter une version anglaise intégrale sur le site : Internet Medieval Sourcebook .
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